
Reconversion des Enseignants | Accompagner différemment
AIDEAUX PROFS : changer de voie sans renoncer à sa mission
Le métier d’enseignant, autrefois perçu comme une vocation stable et gratifiante, connaît une baisse d’attractivité depuis plusieurs années. Le nombre de candidats aux concours de recrutement des professeurs ne cesse de chuter. Les départs volontaires de l’Éducation nationale, quant à eux, augmentent. La reconversion des enseignants est aujourd’hui une réalité qui reflète un mal-être grandissant au sein de la profession. À travers le témoignage de Séverine, nous découvrons comment une approche plus respectueuse du rythme et des besoins des enfants peut être le point de départ d’une seconde carrière.
Évolution professionnelle des enseignants : quand la vocation s’épuise
Le début d’une reconversion : de la passion d’enseigner à la remise en question
« Après une licence de lettres modernes à la Sorbonne, à Paris, j'ai obtenu le diplôme de professeur des écoles. J'ai ensuite enseigné pendant 19 ans en école primaire, principalement en maternelle.
Au cours de ces années au plus proche des tout-petits, j’ai souhaité approfondir mes connaissances. Je voulais proposer un enseignement plus adapté aux besoins de mes élèves. Je me suis donc intéressée aux neurosciences et me suis formée à la pédagogie Montessori.
Par ailleurs, qui dit maternelle dit aussi apprentissage de l’écriture. Cet élément du programme m’a toujours beaucoup intéressé. Au cours de mes années dans l'Éducation nationale, je cherchais constamment à perfectionner et affiner ma méthode d'enseignement dans ce domaine.
Malheureusement, je ne suis pas parvenue à trouver les conditions idéales me permettant de travailler cette notion. Je me heurtais régulièrement aux limites de cet apprentissage en groupe. Par exemple, certains élèves peinaient à maintenir une bonne tenue du crayon dès que je m’éloignais. »
De la classe de maternelle à une seconde carrière : la transition de Séverine
« Quand ma fille était en première année d'école élémentaire, elle a commencé à se plaindre de douleurs spécifiquement liées aux activités d'écriture. Ne sachant pas comment l’aider, j’ai entrepris de chercher des solutions pour y remédier. C’est ainsi que j’ai découvert l’existence de professionnels spécialisés dans l’écriture. En consultant l’un d’eux, la gêne que ressentait ma fille lors des activités graphiques a été résolue.
La découverte de cette profession a été un véritable tournant dans ma carrière. L’année suivante, j’ai pris la décision de me former et de devenir graphoéducatrice.
Aujourd'hui, grâce à mon nouveau métier, je peux consacrer le temps nécessaire à chaque personne, les accompagnant individuellement dans leur parcours. Ma nouvelle expertise me permet d'être beaucoup plus efficace pour aider enfants, adolescents ou adultes à maîtriser une écriture lisible, fluide et confortable.
Depuis janvier 2024, je me suis spécialisée dans l'intégration des réflexes archaïques. Ces derniers peuvent en effet affecter l'apprentissage de l'écriture. Je propose également des ateliers Montessori. »
Burn-out ou quête de sens : les raisons d’un départ de l’Éducation nationale
« Mon intérêt pour la pédagogie Montessori a été une véritable source d’épanouissement en classe. Malheureusement, l’application de ce fonctionnement en maternelle n’a pas été accueillie avec le même enthousiasme par mes pairs. Face au manque de compréhension de mes collègues et à l’opposition ferme d’un inspecteur, j’ai réalisé que je ne me voyais pas continuer dans ces conditions. Cette situation a été un élément clé dans mon envie de partir. D’ailleurs, je me suis toujours dit que je ne resterais pas jusqu’à 60 ans et plus dans l’Éducation nationale. En effet, l’énergie demandée pour gérer une classe me semble difficile à maintenir tout au long d’une carrière.
L’année où j’ai été sous pression avec cet inspecteur, j’ai tenu jusqu’en janvier avant de sombrer dans un burn-out. Je me reconnaissais de moins en moins dans les valeurs que l’école nous demandait de véhiculer. Je trouvais l’institution scolaire de plus en plus violente envers les enfants, peu attentive à leurs besoins et à leur rythme d’apprentissage.
Les contraintes imposées par la crise du Covid, comme le port du masque devant mes élèves et d’autres pratiques absurdes, ont renforcé mon besoin de changer de voie.
Le hasard a bien fait les choses : mon mari a été muté dans le sud de la France l’année où j’ai entamé ma reconversion. Je pense que cela a joué pour l’acceptation de ma rupture conventionnelle. »
Reconversion des enseignants : une richesse professionnelle au-delà de la classe
Rebondir après l'enseignement : comment valoriser son savoir-faire ?
« Tout au long de mon parcours d’enseignante, j’ai développé de nombreuses compétences. L’organisation, essentielle pour gérer et préparer une classe, reste aujourd’hui un atout majeur dans mon activité de graphoéducatrice. Ces aptitudes me sont notamment utiles pour planifier les séances et suivre les progrès des personnes que j’accompagne.
De même, la gestion d’équipe et la capacité à monter des projets me permettent de concevoir des ateliers adaptés et d’interagir efficacement avec les familles et les autres professionnels paramédicaux ou enseignants.
Enfin, la création d’outils pédagogiques, déjà centrale dans mon métier d’enseignante, est toujours au cœur de ma pratique. De cette manière, je viens en aide à chaque enfant, adolescent ou adulte avec des supports personnalisés. »
Quand l'expérience en classe devient un atout pour se reconvertir
« Avoir été enseignante est un véritable avantage dans mon nouveau métier. Cela instaure une relation de confiance avec les parents qui me confient leurs enfants. Cela facilite également le dialogue avec les enseignants. Aujourd’hui, j’enseigne toujours, mais d’une manière différente.
Chaque enfant mérite un accompagnement personnalisé pour surmonter ses difficultés d’écriture. Avec ma méthode de graphoéducation, qui inclut l’intégration des réflexes archaïques, je veille à améliorer les compétences graphiques de votre enfant, à corriger les troubles de l’écriture, et à lui redonner le plaisir d’écrire. » - Séverine Andiazabal - Graphoéducatrice
Quitter la fonction publique : le rôle d’AIDE AUX PROFS
« L’accompagnement d’AIDE AUX PROFS m’a apporté une vision plus claire des démarches administratives à suivre pour quitter mon emploi. L’association m’a soutenue au point d’interpeller Mme Macron pour appuyer ma demande de rupture conventionnelle. Toutefois, ma première demande a été rejetée en juillet 2021 au motif que ma formation n’était pas encore officiellement achevée. J’allais pourtant la finaliser 15 jours plus tard.
Compte tenu de notre déménagement dans le sud-ouest, j’ai opté pour une mise en disponibilité de droit dès septembre 2021. À cette période, ma conseillère en mobilité professionnelle a initié, dès septembre, une nouvelle demande. Cette dernière a abouti favorablement en décembre 2021. Je pense que l’implication de cette conseillère sur mon dossier a également été très précieuse. Elle m’a confié s’être battue pour moi. »
Changer de voie : recommandations pour une réorientation
« Si je devais conseiller un enseignant qui souhaite quitter l’Éducation nationale, ma première recommandation serait de trouver vers quoi se réorienter. Il me semble essentiel d’avoir un projet professionnel solide avant d’envisager une reconversion. Les enseignants maîtrisent de nombreuses compétences transférables, mais en ont rarement conscience.
Par ailleurs, j’encourage systématiquement les professeurs souhaitant évoluer vers une nouvelle carrière à se rapprocher de l’association AIDE AUX PROFS pour être guidés efficacement. »
Envie de souffler ou de réfléchir à une seconde carrière ? Grâce à l’option DISPO de l'association AIDE AUX PROFS, découvrez les avantages des différents types de disponibilité dans l’Éducation nationale.
Devenir prof : quelles options avant de quitter l’enseignement ?
Aide aux professeurs : et si la solution était d’adapter sa pratique ?
« Si je garde un souvenir particulièrement tendre de mes années d’enseignement, c’est sans doute celui où j’ai intégré la pédagogie Montessori dans ma classe.
Pour ce faire, je me suis formée avec les conférences de Céline ALVAREZ et son ouvrage « Les lois naturelles de l’enfant ». Progressivement, j’ai investi dans une grande quantité de matériel Montessori. J’ai fait le choix de fabriquer certains éléments et d’en acheter d’autres.
Ensuite, et pour travailler au plus proche des besoins de mes élèves, j’ai repensé l’espace de ma classe. Par exemple, j’ai supprimé la moitié des tables au profit de tapis pour permettre aux élèves de travailler au sol.
Enfin, j’ai retravaillé l’ensemble de mes progressions de manière à garantir un fonctionnement en adéquation avec le programme de l’école maternelle. »
Reconversion des enseignants : la pédagogie Montessori avant de franchir le cap
« En classe, la mise en place de cette pédagogie m’a apporté le bonheur de voir mes élèves développer le goût et l’envie d’apprendre. Les élèves venaient en classe avec plaisir.
Concrètement, l'enseignement en groupe a été réduit au profit d’un accompagnement individualisé de l’enfant. Pendant que j’intervenais auprès d’un élève, les autres avaient la liberté de choisir des activités. Ces dernières avaient été présentées au préalable ou suivaient une feuille de route structurée selon leurs besoins. Chacun progressait à son propre rythme.
Ce fonctionnement encourageait les élèves à devenir autonomes. Ils apprenaient à choisir leur activité, nettoyer après un atelier, patienter sans m’interrompre le temps que je sois disponible, etc. Naturellement, leur comportement a évolué : plus calmes, plus solidaires, ils s’entraidaient et se motivaient.
Quant à moi, j’ai gagné en sérénité, tout en appréciant le fait de mieux connaître mes élèves. Je savais exactement jusqu’où chacun pouvait compter, quels sons étaient acquis ou quelles compétences nécessitaient encore du travail. Plus besoin d’évaluations standardisées, car j’avais une vision claire et précise de leur progression.
Mon seul regret est que l’institution n’ait pas su – ou voulu – en reconnaître tous les bienfaits pour l’école publique. Sans cela, je n’aurais peut-être jamais quitté l’Éducation nationale. »
Mobilité interne ou externe dans la fonction publique : quelles alternatives à une seconde carrière ?
« En tant que professeur des écoles, plusieurs perspectives d’évolution existent, que ce soit vers un poste de chef d’établissement, d’inspecteur ou encore par le biais d’une mobilité externe hors de l’enseignement.
Me concernant, je n’ai jamais envisagé de devenir directrice. Ma charge de travail était déjà conséquente, et l’idée de devoir, en plus, gérer une équipe et des tâches administratives ne me correspondait pas. Quant au métier d’inspecteur de l’Éducation nationale, il ne m’a jamais attirée non plus. Je ne me sentais pas les compétences pour exercer cette fonction. »
Faire carrière dans l’Éducation nationale : comment éviter la lassitude et l’envie de partir ?
« Si je devais donner un conseil à quelqu’un souhaitant devenir enseignant, mon premier réflexe serait de le mettre en garde et lui dire de ne pas entrer dans ce métier. Ayant quitté cette profession avec amertume et déception, il me serait difficile de l’encourager.
Pourtant, l’Éducation nationale a besoin de professeurs, et je sais que certains y trouvent un véritable épanouissement. J’ai moi-même connu des périodes au cours desquelles j’étais réellement heureuse dans mon métier. Même si ces moments représentent peu d’années sur l’ensemble de ma carrière, être professeur des écoles a toujours été une fierté pour moi. »
Le parcours de Séverine montre qu’il est possible de changer de voie sans pour autant renoncer à l’enseignement. Une reconversion peut être l’occasion d’exercer autrement tout en restant fidèle à sa vocation. Toutefois, un tel tournant nécessite une réflexion approfondie et une préparation solide afin d’éviter les désillusions et de réussir sa seconde carrière en toute sérénité.
Avant de se reconvertir, de nombreux enseignants, comme Séverine, ont dû affronter un burn-out. Ce mal-être, véritable avertissement du corps, ne doit pas être ignoré. Si vous vous sentez épuisé ou perdez le goût d’enseigner, il est essentiel d’agir.
Découvrez les recommandations de notre association pour prévenir ou surmonter le burn-out enseignant
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Interview réalisée par C.K. SEO, Rédactrice web SEO
Fiche métier: Graphoéducateur(trice)
Fiche Métier : Graphoéducateur(trice)
Le métier :
Le graphoéducateur(trice) est un(e) spécialiste du geste de l’écriture. Sa mission consiste à accompagner des personnes confrontées à des troubles affectant le tracé des
lettres.
Il intervient principalement auprès d’enfants et d’adolescents en proie à des difficultés scolaires. Son expertise s’étend aussi aux adultes parfois complexés par une
écriture peu lisible.
Son quotidien consiste à identifier les problèmes d’écriture, à en analyser les causes et à proposer des solutions adaptées.
Un geste graphique déficient peut se traduire par :
● une mauvaise prise en main du crayon,
● une écriture trop grande ou illisible,
● une lenteur excessive,
● un non-respect des lignes,
● des douleurs au niveau des doigts, de la main, du poignet ou de l’épaule.
L’objectif ultime de cette profession est d’aider les individus à progresser, à gagner en confiance et à retrouver le plaisir d’écrire.
Les activités propres à ce métier:
Ce spécialiste de la rééducation propose une prise en charge adaptée aux besoins de chacun à travers différentes étapes :
● réaliser un diagnostic initial pour identifier les troubles de l’écriture ;
● concevoir des stratégies sur mesure afin d’améliorer la posture, la tenue du crayon ou la fluidité du geste ;
● mettre en place des exercices réguliers pour ancrer de nouveaux automatismes ;
● assurer un suivi attentif et ajuster les approches si nécessaire ;
● adopter une posture bienveillante et encourageante ;
● collaborer étroitement avec les parents et les partenaires externes pour une prise en charge globale.
Les compétences requises:
Accompagner et aider les personnes en difficulté avec l’écriture demande un ensemble de compétences essentielles :
● une maîtrise approfondie des troubles de l’écriture, tels que la dysgraphie et la dyspraxie ;
● une bonne connaissance du développement moteur et cognitif de l’enfant ;
● la capacité à concevoir et appliquer des techniques efficaces de remédiation du geste graphique ;
● une grande adaptabilité afin de répondre aux besoins spécifiques de chacun ;
● de la patience et une approche pédagogique pour encourager les progrès des personnes prises en charge ;
● une écoute active et de la bienveillance ;
● une aptitude à travailler en réseau avec les parents mais aussi les professionnels paramédicaux ou de l’éducation, tels que les enseignants, les psychomotriciens ou les
orthophonistes.
Les lieux d'exercice:
Un(e) graphoéducateur(trice) exerce généralement en cabinet libéral de manière indépendante.
Certains professionnels interviennent cependant en milieu scolaire. Dans ce cas de figure, il s’agit bien souvent d'enseignants qui souhaitent enrichir leur pratique par un accompagnement
spécifique à l’écriture.
Formations à réaliser:
Pour exercer cette profession, plusieurs formations certifiantes sont accessibles.
Le site eductus propose une
formation conçue pour les professionnels de l’éducation et de l’enfance, notamment les enseignants et les éducateurs. Accessible dès le niveau licence, elle se déroule sur 130 heures. Ce
programme alterne formation à distance et sessions en présentiel. L’admission se fait sur dossier, comprenant un CV (Curriculum Vitae) et une lettre de motivation. L’obtention du diplôme
repose sur plusieurs évaluations continues ainsi qu’un essai réflexif.
Une autre option est la formation dispensée par Danièle DUMONT, docteure en sciences du langage. Intitulé « Formation
à l’enseignement de l’écriture et à la rééducation de l’écriture », ce programme s’adresse aux enseignants et aux professionnels du secteur périscolaire souhaitant enrichir leurs
pratiques. Il peut également concerner certaines professions du secteur paramédical, comme les orthophonistes, psychomotriciens et posturologues. Cette formation comprend 60
heures de cours, mêlant apprentissages en présentiel et auto-formation guidée.
Enfin, de nombreux graphoéducateurs(trices) choisissent d’élargir leurs compétences en suivant des formations complémentaires. Il peut s’agir d’ergothérapie,
d’intégration des réflexes archaïques ou d’autres disciplines connexes à leur métier.
Sites web utiles :
Pour découvrir davantage cette profession, France 3 Occitanie propose un reportage intéressant sur un cabinet de graphoéducation situé à
Saint-Antonin-Noble-Val.
Pour observer les progrès concrets avant et après l'intervention du graphoéducateur, découvrez cette vidéo réalisée par « les clés de l'écriture ».
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