
Le 27 janvier 2025 François BAYROU a lancé ses services et ceux de la Ministre des Comptes Publics dans l'identification du tiers du millier d'agences et d'opérateurs publics qui pourraient être fusionnés, ou supprimés. Le 27.02.2025 le Premier Ministre a cité le chiffre de "1.244 agences", chiffre relayé par les médias. Le PLF 2025 en liste 434, reste à trouver les 810 restants.
Qu'est-ce qu'un opérateur de l'Etat ?
Le Projet de Loi de Finances (PLF) de 2025 recense 434 organismes dans 54 programmes budgétaires qui ont chacun un projet annuel de performance.
Est opérateur public l'organisme qui a une activité de service public rattachée à la mise en oeuvre d'une politique de l'Etat, avec un financement majoritairement
assuré par l'Etat (par subventions, taxes affectées), avec un contrôle direct par l'Etat, via ses différents ministères, qui servent de tutelles.
Le contrôle de ces opérateurs est assuré par l'Etat qui en nomme les dirigeants, participe ainsi aux organes délibérants et assure le contrôle budgétaire.
Les opérateurs publics ont différents statuts juridiques :
- EPA: Etablissements Publics Administratifs : 51%
- EPIC: Etablissements Publics Industriels et Commerciaux : 8%
- EPSCP: Etablissements Publics à caractère Scientifique, Culturel et Professionnel: 33%
- Groupements d'Intérêt Public : 4%
- Associations : 2%
Des crédits sont affectés chaque année à chacun de ces opérateurs, et certains obtiennent beaucoup plus que d'autre en raison de leur nombre
d'implantations, et leurs effectifs de fonctionnaires mais aussi d'agents contractuels.
Ce site web donne un bon aperçu des budgets d'une partie d'entre eux.
Dans le PLF 2025, voilà la liste des opérateurs publics :
Le 17 décembre 2014 dans le n°158 de la rubrique "Secondes Carrières" sur le Café Pédagogique, nous avions exposé les 14 types de détachement accessibles aux enseignants.
Des fonctionnaires dont des professeurs sont affectés en détachement dans un certain nombre d'opérateurs de l'Etat, les Etablissements Publics Administratifs (EPA)
L'inquiétude née du programme de fusions et suppressions, dont le détail sera connu courant juillet 2025 selon des informations recueillies par notre partenaire TOUTEDUC (dépêche du mardi 13 mai), commence à occuper l'esprit des enseignants détachés.
Sur plus de 16.000 professeurs affectés en statut détaché, plus de 3.400 le sont sur des missions administratives, notamment dans les EPA du CNED (environ 60 professeurs détachés), du réseau CANOPE (plus de 1.200 professeurs en détachement), de l'ONISEP (moins de 300 professeurs détachés), de FEI (au moins 25 professeurs détachés).
Le CNED revêt une importance toute particulière pour les professeurs, puisqu'il accueille plus de 1.000 professeurs en PACD (Poste Adapté de Courte Durée) et PALD (Poste Adapté de Longue Durée) après avoir été en CLM (Congé de Longue Maladie) et/ou CLD (Congé de Longue Durée), trouvant dans le CNED un moyen de se réadapter à un emploi 28h par semaine, majoritairement de chez eux, en télétravail, pour corriger des copies et parfois concevoir des préparations pour les responsables de pôle de formations, qui sont en statut détaché.
L'Education nationale n'a jamais réussi à tenir les promesses de secondes carrières annoncées en 2005 par François FILLON ("500 secondes carrières par an") puis en 2006 par Dominique DE VILLEPIN ("1.000 secondes carrières par an"), pour répondre à la promesse du législateur de "secondes carrières" pour les enseignants, dans l'article 77 de la loi portant réforme des retraites de 2003 qui a allongé les carrières des salariés du Public comme du Privé de 4,5 années.
De 2005 dans le Rapport Chamard, les Députés s'étaient déjà "alarmés" du nombre de professeurs en statut de "mis à disposition" (MAD) pour occuper des fonctions hors enseignement, coûtant près de 150 millions d'euros. Ils en ont donc obtenu la suppression progressive de 2005 à 2012, ces MAD passant de 5.217 à moins de 150 pour toute l'Education nationale.
A la rentrée 2012 il y avait 17.231 enseignants en détachement, un chiffre qui a bien baissé depuis.
Ainsi, pendant qu'une "MIssion SEconde CArrière (MISECA) créée en août 2006 au sein de l'administration centrale, rattachée au Secrétariat Général de l'Education nationale, faisait quasiment semblant de réfléchir aux "secondes carrières des enseignants en difficulté" (car c'est ainsi qu'ils ont présenté leur mission à tous les directeurs des ministères et des collectivités locales, qui ont donc eu dès le départ une image faussée de ces enseignants espérant une reconversion), l'Education nationale supprimait en parallèle les "secondes carrières" qui existaient déjà dans des centaines de structures associatives, et des EPA.
De 2005 à 2012 (Nicolas SARKOZY a été Président de la République de 2007 à 2012), manu militari sans ménagement, les professeurs occupant des missions très intéressantes dans des musées, dans des associations agréées par l'Education nationale, dans des EPA comme le réseau SCEREN (devenu réseau CANOPE), le CNED, l'INRP (supprimé depuis), l'ONISEP, le CIEP (devenu France Education Internationale) ont été sommés de réintégrer devant élèves, sans que leurs compétences soient prises en compte lors de ce retour. Une violence institutionnelle innommable, une absence de Gestion des Richesses Humaines. Durant son quinquennat, Nicolas SARKOZY n'avait pas remplacé 80.000 professeurs partant en retraite, réduisant comme peau de chagrin le stock des professeurs remplaçants, éliminant plus de 5.000 postes de professeurs RASED. Un désastre.
Si François HOLLANDE a reconstitué le stock des professeurs en en recrutant plus de 60.000 durant son quinquennat, en revanche, le stock des secondes carrières accessibles aux enseignants ne s'est pas reconstitué, les restructurations se poursuivant ça et là, notamment au sein de l'ONISEP avec une réduction de près de la moitié des CIO par fusion ou suppression, au sein du CNED avec une réduction du nombre de détachés poussés à la réintégration par non renouvellement de leur contrat de 3 ans renouvelable, et une réduction du nombre de détachés dans le réseau SCEREN (devenu Réseau CANOPE).
Le détachement fait partie des reconversions accessibles sans concours aux professeurs, et le vaste mouvement de fusions, de suppressions, annoncé par François BAYROU et Amélie DE MONTCHALIN, risque bien d'en réduire le nombre, et d'affecter durablement l'attractivité du métier de professeur.
Car tous les professeurs ne veulent pas devenir inspecteur ou chef d'établissement, où le nombre de postes demeure rare, puisque à peine 3% de l'effectif
enseignant réussira en 43 ans de parcours professionnel à faire autre chose que d'enseigner. Environ 3% réussissant à s'en aller via une disponibilité pour suivi de conjoint ou pour
élever un enfant de moins de 12 ans qui sont de droit, et une disponibilité pour convenances personnelles, qui peut être prolongée jusqu'à 10 ans, par tranche de 3 ans, dans la
carrière.
Malgré les titres alarmistes des médias, il n'y a pas d'hémorragie enseignante avec des augmentations délirantes de démissions et de ruptures conventionnelles (expérimentation 2020-2025 dont on ignore à ce stade si elle sera poursuivie), puisqu'elle demeurent mineures, à peine 0.38% de l'effectif global.
Tout étudiant, tout salarié, tout enseignant, doit s'interroger sur la volonté de redevenir attractive, d'une Education nationale qui fait tout ce qu'elle peut pour les empêcher de repartir une fois attirés par concours en son sein, invoquant des "nécessités de service" pour refuser aux professeurs de réaliser leurs projets personnels et professionnels au moment où ils le souhaitent, lorsque ces projets n'ont rien à voir avec les besoins du système.
Tant que le professeur décide de grimper au sein de l'Education nationale en montrant sa loyauté pleine et entière comme inspecteur ou chef d'établissement, tout va très bien dans le meilleur des mondes.
Lorsque par contre, il en vient à faire une demande de cumuls, on le place sous le regard aiguisé d'un référent déontologue qui aura tôt fait de démontrer par A+B que c'est impossible, ou le sera pour une courte durée.
Et quand le professeur mûrit l'envie de partir trop tôt de l'Education nationale (moins de 10 ans), il se heurtera à une terrible mécanique administrative qui fera tout ce qui est en son pouvoir pour le décourager de changer de métier.
La "chasse aux mammouths" destinée à réduire le nombre d'opérateurs publics risque d'être néfaste aux professeurs.
Que préconise AIDE AUX PROFS pour ce projet de restructuration des opérateurs de l'Etat ?
Dans notre réflexion, nous avons préconisé à la Ministre des Comptes Publics via son Directeur de Cabinet depuis mai 2025, nous avons établi un contact direct :
- de conserver le nombre de postes des professeurs en détachement actuel dans tous les EPA de l'Education nationale car ce sont des "secondes carrières" essentielles à pouvoir expérimenter dans une vie d'enseignant,
- de limiter la durée du détachement à 6 contrats successifs de 1 an ou 3 contrats successifs de 2 ans, avant de devoir réaliser le tuilage avec son successeur (durant l'été, juillet-août), de telle manière que ces postes profitent au plus grand nombre, par rotation des postes. Ainsi, ce sont en moyenne 3.400 : 6 = 566 postes qui pourraient, à moyen terme "changer de titulaire" tous les 6 ans, permettant ainsi de satisfaire la promesse de François FILLON en 2005, donc 20 ans plus tard.
- de faciliter la réintégration des détachés en leur proposant plusieurs choix:
* 1.500 points pour le voeu "groupe de communes" de leur choix pour ceux qui veulent retourner enseigner, dans leur ancienne académie, et 1.000 points pour le voeu "groupe de communes" de leur choix partout en France. Ce serait suffisamment attractif pour faciliter la libération de centaines de postes en détachement dès la rentrée 2026.
=> nous avions déjà fait des propositions en ce sens aux conseillers de Vincent PEILLON le 27.08.2012 son Conseiller Spécial Jean-Paul DELAHAYE (IGEN alors) et Bernard LEJEUNE.
* accès au dispositif "Passerelle" avec 6 à 8 mois d'anticipation (à partir de décembre 2025) pour continuer leur parcours professionnel comme Attaché d'administration, ou comme IEN, ou comme IA-IPR pour ceux dont le statut le permet à partir de la rentrée 2026,
* se voir proposer des postes de "faisant fonction" (comme IEN, IA-IPR, Chef d'établissement) avec une formation à partir de la rentrée 2026,
* obtenir une disponibilité pour convenances personnelles afin de continuer leur parcours ailleurs à partir de la rentrée 2026.
- de conserver le nombre de possibilités de PACD et de PALD au CNED, car ces emplois sont vitaux pour les professeurs en grande difficulté de santé. L'ouvrage "Souffrir d'enseigner...faut-il rester ou partir ?" de Rémi BOYER et José Mario HORENSTEIN en a démontré tout l'intérêt en octobre 2013.
Le projet de restructuration des Opérateurs et agences de l'Etat doit permettre de préserver cette richesse de postes en détachement, et d'organiser autrement cette ressource en postes de "seconde carrière", en quittant le mode de fonctionnement actuel de renouvellement jusqu'à la retraite, pour accroître le nombre de professeurs pouvant, dans leur carrière, en bénéficier.
Ce serait ainsi pour l'Education nationale dynamiser ses ressources humaines en les faisant entrer dans une logique de professionnalisation, une logique de parcours, sans qu'un poste en détachement puisse être considéré comme définitif. Les Chefs d'établissement ont bien une limite de 9 ans fixée en poste dans le même établissement. La même logique doit s'appliquer aux professeurs en détachement, pour qu'un plus grand nombre puisse ajouter à son CV ce type d'expérience.

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