Vous avez été professeur d'anglais pendant 23 ans. Quel a été l'élément déclencheur de votre envie d'évoluer professionnellement ?
Plusieurs paramètres sont intervenus de façon concomitante :
- (à mon avis) le manque de moyens pour enseigner une matière (2h d’anglais par semaine pour des lycéens en S, à 30 élèves par classe, c’était pour moi ridicule…),
- l’évolution sociétale (de moins en moins de respect mutuel, entre élèves, entre enseignants, et entre élèves et enseignants),
- des difficultés à envisager un travail sous l’angle d’une hiérarchie et d’une infantilisation (à mon avis) plutôt que sous celui d’un travail d’équipe dans sa globalité. D’autre part, le plaisir que j’avais eu à enseigner ‘librement’ était de plus en plus contraint par des méthodes imposées, qui ne me convenaient pas.
- Enfin, j’avais le sentiment de ne jamais « sortir » de mon métier, d’être toujours à réfléchir (malgré moi) à la façon d’enseigner, à la façon d’utiliser telle ou telle situation pour l’intégrer à une séquence. C’était épuisant puisque mon cerveau ne déconnectait jamais, alors que je n’avais plus envie d’enseigner et que j’y allais avec la boule au ventre !
- Ah, un autre paramètre loin d’être un détail : je n’avais plus d’enfant à charge, donc mes choix n’engageaient que moi.
Depuis que vous êtes devenue documentaliste, vous avez souvent changé d'employeur : pourquoi ?
J’ai eu la chance de bénéficier d’un congé formation, ce qui m’a permis de finir ma licence professionnelle de documentaliste d’entreprise par correspondance, pour laquelle je devais faire un stage de 3 mois et demi en entreprise. J’ai décidé d’utiliser ces dix mois pour faire d’autres stages, connaitre d’autres univers professionnels. J’ai ainsi pu faire des stages dans cinq endroits en dix mois. Ce fut déterminant pour l’obtention d’un poste ensuite. Cependant, c’est parce que je n’avais pas de dépendance familiale et que j’avais déjà souvent vécu hors métropole, que j’étais prête à accepter de travailler loin, de bouger, ce que j’ai été obligée de faire.
En quoi le métier de documentaliste peut-être une évolution professionnelle intéressante pour un professeur ?
Je ne suis pas documentaliste en établissement scolaire, ce qui est très différent d’une reconversion comme professeur documentaliste. De ce fait, je n’enseigne plus, même si je suis amenée à travailler dans un environnement lié à la pédagogie. C’est donc une réelle reconversion.
Quels conseils donneriez-vous à un professeur qui souhaite changer de métier en quittant les élèves ?
Je pense qu’il faut être conscient que personne (au sein de l'Education Nationale, ndlr) ne viendra vous aider, qu’il faudra œuvrer pour se donner les moyens de réussir sa reconversion (quitte à reprendre des études, à devoir travailler en même temps, à devoir déménager, à peut-être perdre une partie de son salaire...).
Il faut croire en soi aussi, car là encore une personne non convaincue de sa valeur ne pourra pas convaincre de futurs employeurs qu’il faut l’employer !
Réfléchir à ce qu’on veut faire, le préparer concrètement, intégrer le fait que cette démarche sera semée d’embûches mais que ce chemin sera peut-être aussi celui de l’épanouissement, de la fierté d’avoir réussi sa reconversion, du plaisir de faire ce qu’on aime.
A savoir aussi : il faut être prêt à consacrer beaucoup de temps à rechercher un emploi, à proposer sa candidature…ce n’est pas simple, mais c’est possible ! Je pense qu’il faut trois éléments pour réussir sa reconversion : de la motivation, du travail, et de l’audace. (C’est souvent la peur d’échouer qui limite l’action…alors que pour marcher, il faut prendre le risque de tomber, et avoir le courage de se relever si cela arrive… Et puis, il ne faut pas avoir peur de l’échec : c’est une possibilité, mais cela n’est pas pour autant une fin !
Aujourd’hui, ma situation est sûrement plus hasardeuse, mais je ne regrette pas du tout ma démarche, bien au contraire !
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