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Le métier de professeur restera-t-il attractif avec le coronavirus ?


Ca y est, la rentrée vient de se produire et 12 millions d'élèves sont retournés sur les bancs de leur école, leur collège ou leur lycée, avec la même appréhension dans tous les esprits: et si je revenais chez moi ce soir avec le coronavirus ?

 

857.000 professeurs et environ 15.000 personnels de direction se posent aussi la question, et les dizaines de milliers d'AED également, et de CPE, et tous les agents de restauration et d'entretien.

 

C'est plus d'un million de personnes, dans ce ministère de 1,3 million de personnes, à se trouver en contact direct dans les établissements avec les élèves.

 

Le protocole sanitaire est exigeant, et Jean-Michel BLANQUER a pris soin avec les expérimentations réalisées depuis le 11 mai 2020 de penser à tous les scenarii possibles pour faire face. C'est une sacrée responsabilité de réaliser une pareille rentrée, un véritable défi à tous nos cerveaux fréquemment lecteurs des articles anxiogènes diffusés par les médias adeptes des actualités en continu.

 

Alors quelles seront les conséquences de cette année 2020-2021 particulière sur l'attractivité du métier de professeur ?

 

Deux cas possibles, très simples : 

- LA REPULSION DURABLE: si les cas de coronavirus se multiplient dans les écoles, collèges et lycées avec de nombreux professeurs hospitalisés puis décédés, il est sûr que le métier de professeur en pâtira de longues années.

 

- LA STABILITE DES EFFECTIFS: si les cas de coronavirus ne sont pas plus importants dans les établissements scolaires qu'en entreprise ou dans les administrations, les professeurs en concluront qu'en se protégeant bien, il est possible de faire face collectivement au virus, solidaires dans cette guerre face à un ennemi invisible et impalpable.

 

Toujours est-il que cette année 2020-21 nécessitera que la GRH de proximité soit à la hauteur des attentes qu'elle a suscitées. Il devient indispensable que l'Education nationale professionnalise ses acteurs en recrutant plutôt :

- des Psychologues du Travail pour réaliser des Bilans de Compétences, 

- des Psychologues Cliniciens pour accueillir les souffrances multiples des professeurs,

- des Coachs en développement personnel.

 

Et que tous aient une meilleure latitude d'action, et que les Recteurs, les Dasen, les DRH, les Chefs de Division DPE, n'aient plus le droit d'invoquer une quelconque nécessité de service pour bloquer le désir de partir d'un professeur, quel que soit son projet.

 

C'est en ouvrant grandes les portes des sorties du métier de professeur que beaucoup auront envie d'y entrer. Il est devenu en une décennie de notoriété sur le web qu'il est difficile de quitter le métier de professeur après y avoir accédé, et que la rémunération est moindre que celle des agents administratifs de catégorie A, et des salariés du privé à égalité de diplôme.

 

Les 400 millions d'euros programmés par le Ministre pour revaloriser les professeurs en 2020 ne suffiront pas à redonner confiance à une profession qui a perdu 40% de son pouvoir d'achat depuis 30 ans. C'est cela le dilemme, l'erreur de ces dernières décennies: le gel du point d'indice d'une part, et le manque de continuité dans l'augmentation des salaires des professeurs.

 

Il pourrait exister une prime "spécial période de Covid"  tant que le coronavirus représente un risque professionnel sur le lieu de travail, mais il semble que les centaines de milliards doivent servir surtout à relever tous les secteurs d'activité bien affectés par cette crise économique de grande ampleur.

 

Alors, quelle sera la solution ?

 

L'attractivité du métier de professeur dans les 2 ans qui viennent et tant que le vaccin n'existe pas, et tant qu'un traitement médicamenteux efficace n'est pas disponible, nous paraît compromise.

 

La seule solution à portée de l'Education nationale est d'entrer dans une nouvelle conception de la gestion de ses effectifs, en proposant une autre approche du métier. Jusqu'à cette année prévaut l'idée du "métier le plus beau du monde exercé à vie".

 

Avec la flexibilité offerte par la moi DUSSOPT, l'Education nationale pourrait elle aussi entrer dans une ère de flexibilité en :

- augmentant les recrutements de professeurs par contrats pour celles et ceux dont l'objectif n'est pas de rester à vie professeurs. La loi prévoit des contrats de 2 à 6 ans, une période de transition professionnelle qui peut correspondre aux voeux de nombreux salariés du privé ou d'étudiants de se forger une première expérience professionnelle sous forme d'engagement donnant du sens à leur vie

 

- augmentant le nombre de recrutements sur profil de compétences pour réduire lors des mutations les postes affectés à l'aveugle par des barèmes qui ne correspondent qu'à des critères familiaux ou d'ancienneté. En montant à 50% de postes profilés contre 50% de postes affectés à l'aveugle, un professeur sur deux choisirait le système qui lui convient le mieux.

 

Les syndicats sont opposés à ce système bien sûr (cf les chroniques de Alain BOUVIER diffusées sur notre blog) car ils souhaitent conserver cette cogestion des carrières qui leur a donné tant de pouvoir d'influence auprès des ministres successifs depuis des décennies, et aussi parce que cela réduirait le nombre de leurs adhérents. Il ne tient qu'à l'Education nationale et aux politiques publiques de déterminer maintenant leurs objectifs de long terme. 

 

Partisans du statu quo, ou inventer une autre gestion des effectifs plus flexible dans l'Education nationale avec des arrivées aussi faciles que les départs ?

 

La crise du coronavirus en offre l'opportunité.

Jean-Michel BLANQUER sera-t-il le plus audacieux des ministres de l'Education nationale depuis 1958 en bouleversant la Gestion des Ressources Humaines à ce point ?

 

Nous le saurons d'ici mai 2022.


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