· 

Daniel AUVERLOT : d'agrégé de lettres de classiques en collège à l'inspection générale puis Recteur, puis…


Daniel AUVERLOT : d'agrégé de lettres de classiques en collège à l'inspection générale puis Recteur, puis…

 

Interview de Rémi BOYER pour l’association AIDE AUX PROFS, publiée dans le mensuel n°134 de juin 2012 sur le Café Pédagogique.

 

Quel a été votre parcours de carrière depuis la fin de vos études ?

 

Après un Bac A en 1974, j’ai préparé puis été admissible à l’ENS d’Ulm. J’ai obtenu mon Capes de Lettres en 1978 puis l’agrégation de Lettres Classiques en 1980.

 

Après avoir enseigné 2 ans en collège, puis 4 ans en lycée, j’ai saisi en 1986 une opportunité, en étant détaché au Ministère de la Défense comme responsable des stages étrangers à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan, jusqu’en 1994. Après une inspection que j’avais demandée, il m’a été proposé d’enseigner en CPGE de Lettres au Havre, poste que je n'ai finalement pas accepté puisque en parallèle il m’a été demandé de devenir Directeur de cabinet du Recteur de l'académie de Rennes.

 

J’ai travaillé avec deux recteurs pendant 5 ans : Pierre LOSTIS puis William MAROIS, actuellement recteur de Créteil.

 

En 1999, après avoir passé le concours, je suis devenu IA-IPR puis j’ai passé un an de formation à l’ESEN. Mon premier poste, de 2000 à 2002, a été IA adjoint dans le Val-de-Marne, et les trois années suivantes IA-DSDEN en Mayenne.

 

De 2005 à 2008, j'ai été IA-DSDEN du Maine-et-Loire, et de 2008 à 2012 en Seine Saint-Denis. J’ai quitté ces fonctions récemment en mars, puisque j’ai été nommé Inspecteur Général de l’Education nationale (IGEN).

 

Qu’avez-vous apprécié dans le métier d’enseignant, et avez-vous parfois regretté de l’avoir quitté ?

 

Je n’ai jamais eu le sentiment de quitter le métier d’enseignant, car lorsque je pilotais un Comité Technique Paritaire, j’y transférais les compétences que j’avais pu acquérir comme enseignant : l'art de la pédagogie en particulier est essentiel face aux politiques, aux organisations syndicales et aux médias. Ce n'est pas un paradoxe que de dire que je fais presque plus de pédagogie que lorsque j’enseignais.

 

Quelles sont les missions et responsabilité s d’un IA-DSDEN, maintenant d'un DASEN ? Pouvez-vous nous raconter une journée-type ?

 

La mission est de mettre en œuvre et d’expliciter la politique choisie par les ministres successifs, et de mettre ces grandes orientations en œuvre sous la direction d’un recteur. Sur les trois postes que j’ai successivement occupés, celui en Seine Saint-Denis était atypique. En Mayenne et en Maine-et-Loire, mon agenda se déroulait comme prévu, alors qu’en Seine Saint-Denis, les imprévus le rendaient très élastique.

 

En Mayenne, une journée type, ce pouvait être le matin une réunion de 2 heures avec des équipes de direction, puis une réception de chefs d’établissement nouvellement nommés pour leur fixer leurs lettres de mission. L’après-midi pouvait être consacré à la tenue d’un Comité Technique Paritaire sur la carte scolaire du 1er degré, et le soir par la réception des IEN pour réaliser l’étude des travaux pédagogiques dans le département. Mon temps de travail oscillait entre 8h et 19h30 environ.

 

En Seine Saint-Denis la charge est différente : le travail de coordination avec les autres services de l'Etat est très important, notamment dans le cadre de la politique de la ville, les imprévus sont nombreux, différents incidents émaillent la vie des établissements scolaires, les délégations plus ou moins prévues d'enseignants sont toujours reçues à l’Inspection académique. Mon temps de travail sur ce poste s’étirait entre 7h et 20h de ce fait.

 

Quelles compétences, acquises comme enseignant, vous ont été le plus utiles par la suite ?

 

D’abord, j’ai développé beaucoup de modestie, car j’ai eu à faire le grand écart entre les connaissances universitaires et ce que les élèves de collège savaient, lors de ma première affectation, dans un collège de la Moselle.

 

J’ai développé aussi beaucoup d’humilité pour m’adapter. Ensuite, en Lettres, l’apprentissage n’est pas linéaire comme il peut l’être en mathématiques. On revient sans cesse sur des notions que l’on croyait acquises par les élèves, qui oublient vite. Il faut donc faire preuve de patience, d’adaptabilité aussi.

 

Enfin, savoir travailler en équipe est très important, notamment pour monter des projets, même si les textes ne rendent pas toujours la tache aisée. Par la suite, ce qui m’a été utile dans ce que j’ai appris dans l’enseignement, c’est cette patience dont il faut savoir faire preuve, cette qualité d’observation aussi, pour repérer rapidement les absents, ou ceux qui acquiescent en réunion tout le temps sans jamais s’exprimer, mais ne vous sont pas forcément favorables.

 

Vous avez agi pendant 4 ans et demi dans l’ académie de Créteil, où 20% des nouveaux enseignants débutent : quelles sont les grandes problématiques auxquelles ils doivent se confronter ?

 

Quand j’ai quitté le Maine-et-Loire, quelqu'un s'est écrié « la Seine Saint-Denis n’est pas une promotion » tellement le un département fait peur. Et en effet, les enseignants qui y sont nommés ont peur de leur affectation. De plus, ils ont du mal à se loger, du fait de la cherté des prix parisiens. Soit le logement n’est pas cher mais l'environnement peut se révéler problématique, soit c’est très agréable et inaccessible pour un enseignant.

 

C’est la raison pour laquelle j’ai eu l’envie de créer une agence du logement à l’IA, pour leur faciliter la tache. En Seine Saint-Denis, même si les élèves sont parfois plus difficiles, plus remuants, des établissements réussissent parfaitement grâce à la solidarité et à l'esprit d'équipe de tous les personnels. L’individualisme est presque impossible dans ce département. Tous les personnels d’un établissement doivent savoir travailler ensemble : enseignants, CPE, équipe de direction, personnel administratif et ouvriers.

 

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué sur vos fonctions ? Qu’avez-vous le plus apprécié ?

 

J’ai eu grand plaisir à exercer des métiers différents. Le métier d’Inspecteur d’Académie m’a passionné, car j’y ai disposé d’une très grande autonomie sur un territoire, naturellement sous l'autorité des recteurs successifs que j'ai servis dans mes différentes affectations.

 

Vous êtes devenu IGEN : en quoi consistent maintenant vos missions et responsabilités ? A quels aspects du système éducatif vous intéressez-vous le plus ?

 

Tous les IGEN sont dans des groupes, et j’ai choisi celui du 1er degré, car les enjeux y sont décisifs, en amont du collège, dans le cadre de la future école du socle. En Primaire, l’acquisition de la langue, la découverte du statut d’élève, l’acquisition du langage mathématique sont décisives pour la suite. Les professeurs des écoles sont des personnels polyvalents dans leurs compétences, et il est important de les accompagner dans leur mission en étant conscient qu'ils ne peuvent pas être des spécialistes de l'ensemble des disciplines.

 

 

Aux dernières nouvelles, Daniel AUVERLOT a poursuivi une très belle progression professionnelle depuis 2012 :

 

2013-2016 : Président de l’association française des acteurs de l’éducation (bénévole)

 

2014 à 2017 : Sous-directeur évaluations et performance scolaire et de la prospective

 

2017-2018 : Recteur de l’Académie de Limoges

 

2018-2023 : Recteur de l’Académie de Créteil

2023-2025 : Président du Conseil d’évaluation de l’école


Écrire commentaire

Commentaires: 0